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Le delta du Mékong : la menace de la sécheresse aujourd'hui, celle de la disparition demain ?

Une forte sécheresse est attendue au Cambodge et dans plusieurs pays du bassin du Mékong jusqu’en janvier, selon la Mekong River Commission (MRC), l’institution intergouvernementale qui œuvre pour une gestion commune des eaux du fleuve. Le fleuve a atteint son plus bas niveau depuis une soixantaine d’années, et son débit est exceptionnellement faible depuis juin. La saison des pluies a été inhabituellement courte dans la région du bas Mékong ; si la sécheresse persiste, les conséquences seront importantes sur la production agricole et la consommation en eau pour les 60 millions de personnes qui habitent sur les berges du fleuve.

Affaissement des terres

La menace demain est celle de la montée du niveau de la mer, pour ce delta grand de 40 577 km² (le troisième au monde). Les conclusions du programme de recherche Rise and Fall menée par des scientifiques néerlandais de l’université d’Utrecht et de l’Institut Deltares sont effrayants : le delta s’enfonce rapidement, et pourrait disparaître au cours de ce siècle, plus rapidement que prévu. L’altitude moyenne du sol dans le delta serait extrêmement basse, à seulement 0,8 mètre au-dessus du niveau de la mer – soit 2 mètres plus bas que les précédentes estimations. Avec l’élévation du niveau de la mer de 3 à 4 mm par an et l’affaissement de certaines zones rurales du delta de 10 à 20 mm par an, le résultat est sans appel : à ce rythme, plus de la moitié du delta du Mékong, situé au Vietnam disparaîtra sous le niveau de la mer d’ici 2100 si rien n’est fait pour inverser la situation, forçant des millions de personnes à se déplacer.

Surexploitation des eaux souterraines

Cette situation est due à de multiples facteurs liés au changement climatique, à l’urbanisation et au développement économique, à l’extraction de sable et à l’exploitation des barrages.

L’étude a mis en lumière les conséquences de la surexploitation des réserves d’eaux souterraines, qui était estimée à environ 2,5 millions de m3 par jour en 2015, pour l’agriculture et l’aquaculture notamment. Elle a provoqué et accéléré l’affaissement massif des terres dans le delta, certaines zones s’enfonçant à un taux pouvant atteindre 6 cm par an. Les eaux souterraines seront aussi potentiellement de plus en plus salinisées par l’intrusion d’eau de mer dans le delta.

L’impact sera très important pour cette région, grande zone de production rizicole, en termes de sécurité alimentaire, d’équilibre environnemental et de niveau de vie.
Les chercheurs préconisent au Gouvernement vietnamien de s’attaquer aux causes profondes liées à l’exploitation des eaux souterraines et du sable afin de contenir le phénomène. D’après leurs projections, si aucune augmentation de l’extraction des eaux souterraines n’est enregistrée, le pourcentage des terres qui seront sous le niveau de la mer diminuera avec près de 50% au-dessous du niveau de la mer en cas d’extraction stable et un tiers seulement si la consommation d’eau souterraine est réduite de 75%.

L’impact des barrages en amont

L’affaissement des terres dans le delta du Mékong est exacerbé par la pénurie de sédiments fluviaux. Ils sont en effet bloqués en amont par une série de barrages construits sur le Mékong ou extraits par les exploitants de sable. Plus de 1000 barrages sont déjà opérationnels sur le fleuve et ses affluents et des dizaines sont encore en construction en Chine et au Laos, qui espère devenir “la batterie de l’Asie du Sud-Est”.

Ces infrastructures contribuent à modifier le régime hydraulique du fleuve et les cycles de vie et de migration des poissons. Fin octobre, les autorités laotiennes ont mis en service le méga-barrage hydraulique de Xayaburi, 44ème barrage sur le cours principal du Mékong et le plus puissant (1 285 MW de capacité installée). Projet controversé sur un plan environnemental et source de tension entre le Laos et ses voisins du Bas-Mékong, le Cambodge et le Vietnam, Xayaburi a de nouveau été l’objet de critiques à cette occasion : les ONG ont ainsi lié la sécheresse durable qui sévit 300 kilomètres en aval et les premiers tests effectués en juin pour sa mise en service…

Crédits photos : MRC

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